Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
http://aspar.over-blog.org
L'ASPAR à REVILLE

Homélie lors de la messe d'inauguration de l'Orgue

Au temps d'Isaie, comme au temps de Jésus, on ne maniait pas les clefs comme aujourd'hui. Les clefs n'avaient rien de miniatures. C'était de lourdes barres de bois que l'on glissait au travers des portes des remparts qui entouraient les villes. Il fallait des épaules larges et solides pour les trasporter.Signes du pouvoir, posséder des clefs imposait le respect.

 

Aujourd'hui, devenues beaucoup plus légères, les clefs nous envahissent. Codes secrets et digicodes. Portes de plus en plus verrouillées. Partout il faut boucler à double tour et tout mettre sous clefs. Dans notres société inquiète, la multiplication des clefs en dit long de nos peur de l'autre, de nos sentiments d'insécurité et de nos fermetures sur nous mêmes.


Au temps de Jésus, les pharisiens et les chefs religieux détenaient les clefs de la religion d'Israel. Mais plutôt que de s'en servir pour ouvrir les portes, eux aussi ont préféré fermer 
à double tout la porte de la maison de Dieu. Les accès au temple ou à la synagogue sont devenus difficiles pour quantités de pauvres et de pécheurs, tenus à l'écart, rejetés loin de la maison du père.

 

C'est dans ce contexte que Jésus parle dans l'évangile. Il se présente comme celui qui détient  les clefs du Royaume de Dieucomme s'il avait reçu en possession les 
clefs de la maison de Dieu. Mais alors, qui est il ? D'où tient-il cette légitimité ? Qu'est-ce qui lui vaut un si grand pouvoir ? Comment peut-il prétendre posséder les clefs de la maison de Dieu ?

Jésus est le fils auquel le père a tout remis, y compris les clefs de sa maison. Mais la manière dont Jésus se sert des clefs du Royaume de Dieu n'a rien à voir avec celle des pharisiens et des docteurs de la loi. Car, plutôt que de fermer la porte de la religion aux petits et aux pécheurs à cause de leur indignité, Jésus au contraire, leur ouvre en grand les portes du Royaume. Il les appelle à la confiance en Dieu. Il les exhorte à se laisser convertir pour recevoir et vivre l'amour de Dieu.

Jésus ouvre aux hommes la porte du règne de Dieu. Il est la clef qui ouvre aux hommes l'accès à une vie nouvelle. Tous ceux qu'il accueille entrent alors dans une relation nouvelle à Dieu qu'ils reconnaissent comme un Père. Ils entrent aussi dans une relation nouvelle aux hommes qu'ils reconnaissent comme des frères. Jésus ouvre en grand les portes de la maison de son Père aux hommes ses frères.

Cet esprit d'ouverture du Christ sera la cause d'un malentendu tragique avec les clefs d'Israel qui mettront en cause sa prétention à détenir les clefs de la maison de Dieu parcequ'ils ne supportent pas l'usage qu'il en fait. Comment peut-il prétendre ainsi ouvrir l'espace sacréde Dieu aux pécheurs ? L'évangile est cause de scandale.

Ce scandale redouble quand nous voyons Jésus confier ses clefs, les clefs du Royaume de son Père, au simple disciple qu'est Pierre. Non seulement Jésus possède les clefs de la maison de son Père mais il les confie à Simon Pierre !

Le plus souvent, nous n'aimons pas donner nos clefs à la légère. Confier ses clefs à quelqu'un n'est pas anodin. Donner ses clefs, c'est prendre le risque de se laisser dérober son trésor ou son intimité. C'est se montrer vulnérable. Perdre sa protection. Donner les clefs de sa maison à un autre est un grand signe de confiance. Quand le Christ donne les clefs de la maison de son Père à Pierre, il témoigne envers lui d'une extraordinaire confiance.

 

Pierre n'est pas le plus grand. Il n'est pas le plus savant ni le plus doué des disciples. C'est pourtant lui, cet homme primaire et incohérent  , qui reçoit les clefs du Royaume. Saint Pierre, symbole de l'Eglise, petite et fragile comme lui.

 

Beaucoup s'interrogent alors, aujourd'hui encore: Comment le Christ ose-t-il confier les clefs du Royame à Pierre et à l'Eglise ? Comment des hommes aussi faibles peuvent-ils se voir remettre les clefs de la maison de Dieu ? N'est-ce pas folie de donner un tel pouvoir à des hommes et à une institution aussi faillibles ?

 

La remise des clefs par le Christ à l Eglise place celle-ci dans la responsabilité d'ouvrir aux hommes la porte du Royaume. C'est sa mission première d'ouvrir à tous les portes de la maison de Dieu.

 

Mais il arrive que l'Eglise ne se montre pas digne de la confiance qu'elle a reçu du Christ. Qu'elle use à mauvais escient des clefs soit en verouillant excessivement les portes par dureté de coeur, soit au contraire, en laissant les portes grandes ouvertes, sans discernement.

 

Demeurer fidèle à la mission qu'elle a reçu du Christ suppose que l'Eglise, à la suite de Pierre, ne cède ni à un comportement sévère ou rigide, ni à une attitude démagogique. Elle doit refuser la rigidité, car la porte de Dieu doit demeurer ouverte à tous et l'Eglise témoigne deb la miséricorde du Christ. Elle doit refuser la démagogie, car la porte, nous dit l'évangile, est une porte étroite et la voie du Christ n'est pas sans exigences. C'est bien sur cette voie etroite et exigeante que nous guide aujourd'hui le pape François, successeur de Pierre.

 

Dans notre société contemporaine beaucoup sont devenus ignorants de l'Evangile. L'Eglise est chargée d'indiquer à tous le chemin du Christ. Aux hommes et aux femmes qui ont perdu le chemin de Dieu, l'Eglise a pour mission de rappeler la voie de l'Evangile.  Elle le fait à temps et à contre-temps, en témoignant de la Bonne Nouvelle, en célébrant les sacrements et en s'engageant au service de l'épanouissement de la personne humaine dans toutes ses dimensions, ne craignant pas de sortir de ses forteresses et de ses sentiers battus.

 

Il se trouve qu'aujourd'hui, dans notre société actuelle, l'experience du beau redevient l'une des voies d'annonce de l'amour de Dieu aux hommes. L'experience artistique peut ouvrir dans le coeur de l'homme qui la reçoit une respiration qui l'ouvre à l'immensité de Dieu. C'est pourquoi l'Eglise a, si souvent dans l'histoire, favorisé l'expression des arts. La musique spirituelle y trouve une grande place tant elle participe à élever les âmes vers Dieu.

 

Frères et soeurs, ce matin au commencement de l'eucharistie, nous avons béni l'orgue de notre église. Bien plus qu'un simple instrument de musique, l'orgue dans l'église est un acteur de la liturgie. Il impulse le souffle, il chante, il fait résonner la prière et la louange de Dieu, il porte à l'inspiration. L'orgue est un instrument de l'Esprit. Quand nous chantons avec l'orgue, quand nous écoutons la musique sacrée, nous ouvrons nos coeurs au souffle de Dieu. " Chanter, c'est prier deux fois " disait Saint Augustin.

 

Frères et soeurs,en ce dimanche, jour du Seigneur, que notre prière nous convertisse à l'Evangile dans le souffle de l'Esprit Saint. Que, par la grâce d ses chants et de sa musique, notre Eglise ouvre dans les coeursde tous les hommes la porte de la maison de Dieu. Amen.